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Église de Bourbriac : l’inscription de la tour de l’église

Une inscription énigmatique dans un triangle

Que représente, sur la face ouest de la tour de l’église de Bourbriac, ce triangle que l’on devine mêlé à des inscriptions peu lisibles ?

En 1765, l’église fut en partie détruite par un incendie. La tour, fragilisée, nécessita d’importants travaux qui furent mis en œuvre en 1826, sous l’impulsion de   l’abbé Toussaint Brion qui, curé de 1818 à 1823 entreprit les premières démarches, parmi lesquelles une lettre adressée à la Duchesse d’Angoulème. « Il obtint une imposition extraordinaire [de 20 centimes par franc sur le montant des impôts fonciers pendant l’année 1826] et conclut un marché au prix de 9000 f avec Jean Botorel maître maçon à Guingamp. Pendant l’exécution des travaux deux personnes furent tuées : Henri Le Guézennec, président de la fabrique et Yves le Maout manœuvre. […] M. Bidan [qui succéda à Brion en septembre 1823] fit couvrir la tour d’une petite flèche en ardoises, parce que les ressources lui manquaient pour une flèche en granit. Cela demandait tous les ans des réparations dispendieuses et difficiles, tant à cause de son élévation que par la violence des vents, qui venaient s’engouffrer aux jours de tempête, enlevant les ardoises et même des parties de la charpente. » Louis Bidan est qualifié de « prêtre zélé et entreprenant ». Déjà en 1821, la charpente menaçant ruine, « on décrète réparations et pour y aider abattre 10 pièces de chêne sur le placître du Danouet et utiliser pierres et bois de la chapelle ruinée de St-Jude », écrit l’abbé Bertrand Loyer dans ses notes manuscrites.

C’est en mémoire des travaux de 1826 que fut sculptée l’inscription qui nous intéresse. On y trouve les noms des principaux notables de Bourbriac à cette époque : maire, conseillers, curé, membres du bureau de Conseil de Fabrique, qui jouait alors un peu le même rôle que l’EAP (Équipe d’animation paroissiale) de nos jours. Voici les noms que nous avons pu déchiffrer. Ceux du côté gauche sont en partie effacés par l’érosion et de ce fait tous ne sont pas lisibles.

 

L’inscription 

– en gros caractères sur la gauche et en haut sur la droite (hors du triangle) on lit

– à gauche, de haut en bas : J:JULOU/ IHS /CMIR  / LE MEN / M / LOZACH / J BOTOREL / ENTREP[preneur]

Les abréviations sont celles des prénoms de Casimir Le Men et Mathurin Lozac’h dont la présence est attestée à l’époque des travaux.

– à droite, en haut, jouxtant le triangle : LE MEN  ; dans la colonne plus à droite, il n’y a pas d’inscription sur toutes les pierres. Je lis : Y:GRAET (pour Yves le Graët, membre du conseil municipal, et, dessous, sans certitude, J:GRAET  (Jean le Graët le jeune était comme son homonyme membre du C.M. Je n’ai pu pour l’instant déchiffrer les autres noms.

Au bas de la colonne : LAN1826.

– Dans le triangle, sous la figure sommitale aux trois étoiles : R LE PALLIER/ MAIRE [René Le Pallier fut maire de 1812 à 1830]/ L BIDAN (puis peut-être : CURE). Puis, d’autres noms en plus petits caractères dont seuls 4 me sont compréhensibles : AMBROISE / KGOAT [=Kergoat, ], DE BIZI(en du) HELLOCH / LAURENT HILLION PRESIDENT / YVES DIRIDOLLOU / RENE PIERRE LOZAHIC TRESORIER.

Hillion, Le Men, Ambroise Le Guillou-Kergoat ont été tour à tour maires à l’époque des travaux. Ambroise [Le] Guillou est probablement celui qui, alors receveur de l’enregistrement et des domaines nationaux de l’Arrondissement de Bourbriac depuis 1793, fit bâtir le château de Coatmin en 1812. (B. Loyer).

Pour ce qui est de la famille noble des Bizien, connus comme seigneurs du Lézard, l’abbé Loyer note pour 1761 : « Les Bizien se partagent le Helloc’h et le Lézard. […] François, chevalier Comte du Lézard et du Helloc’h… » et, en 1805 : « Augustin Jean-Marie de Bizien est parrain d’un enfant Le Graët, fils de René Le Graët et d’Yvonne Guézennec. Ceux-ci étaient au Helloc’h. C’est donc un Bizien du Helloc’h. » Ainsi le nom De Bizien du Helloc’h est bien attesté au début du XIXe siècle. C’est ce nom qui apparaît dans l’inscription de la tour datée de 1826.  Bizien du Helloc’h était l’un des plus importants propriétaires terriens de la commune.

L’abbé Bidan coiffa la tour d’une petite flèche en ardoise, qui fut emportée par le vent dans la nuit du 7 au 8 janvier 1867. C’est pour la remplacer que l’on construisit la flèche actuelle, bien solide celle-là !

Merci à Jean-Paul Le Buhan, auteur du livre Les signes dans la Pierre, pour ses conseils avisés !

Jef Philippe.

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