Homélie – Messe du Jeudi Saint 2021 – Dominique Faidherbe

(Lectures : Ex 12,1-8,11-14//Ps115(116B)// Co11,23-26// Jn 13,1-15)

Frères et Sœurs en Jésus-Christ,

J’aime le jeudi de la semaine sainte ! C’est pour chacun de nous le rappel d’un temps de repas, d’un temps fondateur de l’Église, avant de plonger dans la tristesse et le drame de la Passion. Nous l’avons entendu dans le livre de l’Exode : tous les juifs, croyants et pratiquants, feront mémoire de ce grand passage de Moïse et du peuple Hébreu  de la servitude à la liberté.

Jésus veut passer ce repas , un dernier repas, avec ses amis. « Il n’est pas venu abolir mais accomplir » la loi, le rituel : lui donner sa vraie dimension… éternelle et universelle : la libération de l’humanité tout entière invitée par Dieu à entrer dans la Vie qui ne finit pas, à partager son immortalité et son amour infini.

Il n’est pas certain que les apôtres aient pris conscience de l’importance du mystère qui s’est vécu ce soir-là. Ils veulent bien faire la fête mais ils n’ont pas trop le cœur à cela : depuis quelques jours ‘’le maître‘’ ne cesse de leur répéter que sa fin est proche. Le climat est tendu : à l’extérieur les gens sont nerveux… Le triomphe de l’entrée de Jésus à Jérusalem a le goût des troubles actuels en Birmanie ou au Sénégal : les autorités religieuses et le procurateur Romain sont prêts à une intervention s’il y a encore des troubles à l’ordre public.

Et voilà , Seigneur, que tu arrives en tablier de servante, avec un broc d’eau, une vasque et tu veux nous laver les pieds. D’habitude tu nous répètes que les ablutions traditionnelles ou le lavage des mains avec de la solution hydroalcoolique n’ont de valeur que si nous commençons par purifier notre cœur et nos pensées ! Il t’en faut de la patience pour que nous commencions à comprendre tes paroles et tes gestes.

« Vous m’appelez maître et Seigneur et je le suis ». Je vous l’ai souvent dit et au Mont Thabor vous avez entendu mon Père vous le dire.’’ Maintenant je m’en vais. L’un de vous va même me trahir, vous trahir ! Je ne m’y opposerai pas !…

En vous lavant les pieds je vous demande « d’être à votre tour et désormais les serviteurs les uns des autres. » Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » Vous tous ici , vous que j’ai choisis et appelés, soyez toujours humbles et au service des plus petits… Alors oui, vous aurez part avec moi !

Laissons l’extérieur faire de la politique politicienne. Soyons dans la fête, ensemble et réellement unis, vous que j’appelle « mes amis ! » Ce dernier repas c’est celui que vous répèterez et partagerez avec tous ceux qui acceptent d’écouter les paroles de mon Père et que je vous ai transmises. Je vous quitte bientôt mais je serai éternellement avec vous. Je serai au milieu de vous dès que deux ou trois se réuniront en mon nom pour prier. Je serai et je suis avec vous DANS ce Pain et ce Vin que j’offre et que offrirez à mon Père dans les cieux, mon Père et votre Père.

‘’Oui ce pain que je vous donne est mon corps livré pour vous, et ce vin c’est mon sang versé pour vous. Vous mes amis que j’ai appelé à me suivre. « Vous ferez cela en mémoire de moi ! » Merci Saint Paul d’avoir transmis ces paroles qui lui ont été dites par les premiers témoins.

Ces amis directs ont répondu « me voici ! » à l’invitation de Jésus, laissant là leur barque, leur entreprise, leurs ambitions, leurs projets humains… Ce soir-là ils sont abasourdis : il y a encore des passages à traverser : la mort de Jésus, le tombeau vide, la venue de l’Esprit Saint pour qu’ils comprennent, pour qu’ils soient à son imitation jusqu’aux extrémités de la terre, pour qu’ils transmettent cette foi à d’ autres ‘’me voici !’’ Depuis deux millénaires, les très proches de Jésus transmettent sa Parole, sa présence, son pardon, ses invitations afin que nous disions nous aussi et chaque jour ‘’ me voici !’’

Évêques et prêtres sont et assurent la succession des apôtres : Denis, Lucien, Pierre, Gaëtan, Guy, Alexandru, Xavier, Francis, Paul, Hervé… et tant d’autres qui sont dans nos mémoires… Ils offrent à Jésus et à son Église leur disponibilité totale, leur vie, leur foi et leur espérance.

Comme Pierre ils peuvent être fougueux et audacieux ; comme Pierre, il peut arriver que certains trahissent… Comme Thomas, ils ont leur franchise mais ils peuvent aussi douter. Comme Thomas ils savent proclamer « Mon sauveur et Mon Dieu ! » Comme Jean ils admirent Marie au pied de la croix. Comme Jean Ils accueillent Marie comme mère : ils accueillent nos détresses et nos chutes et nous redisent l’amour et la miséricorde inépuisables de Dieu.

Ce sont des humains comme nous tous avec des limites et des fragilités, et ils portent aussi la croix. Les différentes chutes du Christ au Calvaire, ce sont toutes les erreurs et les crises traversées par l’Église depuis son origine. Et il y en a eu à toutes les époques. Des membres de l’Eglise ont commis des actes déplorables, criminels et nos yeux sont restés clos et nos oreilles bouchées. Depuis des années l’Église fait la vérité sur ces drames qui ont fait tant de victimes : Elle entend leurs souffrances , elle agit et cherche comment réparer. Nos évêques de France se sont réunis récemment et ont adressé à tout le peuple chrétien une lettre d’intentions et d’actions en réparation*.

Les prêtres et les évêques ont besoin de notre aide comme nous avons besoin de leur aide et présence : épargnons-les de nos mesquineries, nos désunions, nos critiques gauloises d’autant plus en cette période d’incertitudes. Le bien est toujours à faire, le mieux est toujours à découvrir et à agir.

Au nom de toute l’assemblée, merci mon Dieu de nous donner de bons prêtres. Amen.

Dominique FAIDHERBE, diacre.

* Le texte des évêques est consultable sur ce site (cliquer sur le lien) : https://www.paroissespaysdeguingamp.catholique.fr/actualites/lettre-des-eveques-de-france-aux-catholiques-sur-la-lutte-contre-la-pedophilie/